Pas de SO2, pas de sucre, rien que du raisin. Cela oblige le vigneron à être accompagnateur et non transformateur.
Gilles Azzoni
Où ?
Dans le sud de l’Ardèche, entre Cévennes et vallée du Rhône, le Mas de la Bégude est à vingt-cinq minutes de route d’Aubenas et à quarante minutes de Montélimar. C’est un lieu de paix et de sérénité au creux d’une vallée, tout proche des très touristiques gorges de l’Ardèche mais beaucoup plus tranquille. Après avoir appris la taille de la vigne en Bourgogne et la viticulture à Bandol, Gilles Azzoni, Parisien d’origine, s’installe en fermage à La Bégude en novembre 1983, exploitant la ferme et six hectares de vignoble. Dès l’origine, son souci est de pratiquer une viticulture dans le respect de la nature. Il veut faire « les vins qu’il aime boire » : des vins de soif, pas trop alcoolisés, et sans sulfite ajouté. Ce n’est pas la méthode la plus facile, mais « il faut aimer le rock and roll », dit-il. Gilles commence par s’orienter vers l’agriculture biologique, entièrement implémentée en 1997. Les certifications (Ecocert et Nature & Progrès) sont obtenues en novembre 2010. Depuis que son fils, Antonin, a repris le domaine et assiste son père, une activité de négoce a été ajoutée aux pratiques de la ferme. Antonin choisit de ne pas reprendre toutes les vignes de Gilles et se concentre sur la vinification, savoir-faire où il excelle. Il n’a pas touché aux cuvées emblématiques de son père, Fable et Hommage à Robert ; on dit même qu’il leur a ajouté encore plus de fraîcheur.
Terroir, parcellaire et encépagement
Le terroir est celui du Sud ardéchois, sec, caillouteux et argilo-calcaire. Les six hectares de vignobles sont adossés aux collines et jouxtent la forêt. Le lieu a été cultivé pendant des siècles, non seulement en vigne mais aussi en céréales (orge, seigle), sous la forme de culture en terrasses si commune autour de la Méditerranée mais aujourd’hui délaissée. Dommage, selon le vigneron, car c’était un excellent moyen de préserver la fraîcheur des sols dans un milieu volontiers aride. Toute la surface de vignes n’est pas exploitée, et les cuvées proviennent à la fois des raisins du domaine et de raisins bio d’autres domaines voisins. Les vins étant tous en appellation Vin de France, la plus grande liberté est possible dans les assemblages. Cultivés sur place ou à proximité, les variétés typiques de la région sont bien là — syrah, grenache et viognier —, mais on trouve aussi merlot, gamay, alicante, cabernet sauvignon, sauvignon blanc et chardonnay.
Méthodes culturales
Entièrement biologiques, rien d’ajouté à la vigne, rien d’ajouté au chai. L’enherbement des sols et le semis d’engrais verts sont pratiqués. Le domaine est membre de l’Association des vins naturels (AVN).
Vinification
Le terrain en pente a permis l’établissement, dans les années 80, d’un chai entièrement gravitaire à partir d’un bâtiment antérieur que Gilles a doté d’une mezzanine. C’est à ce niveau supérieur qu’arrive la vendange. Les raisins, portés à la main dans leurs caissettes, sont directement recueillis dans quatre cuves de fermentation en acier inoxydable, respectivement baptisées Zola, Brel, Chaplin et Camus. C’est aussi dans ces cuves que se déroule l’élevage des vins. La mise en bouteilles est également gravitaire. La vinification se fait en grappes entières pour trois quarts de la production avec une macération carbonique de huit jours à un mois pour l’obtention de vins frais et fruités. Quelques remontages, pas de pigeage. L’activité de négoce conjuguée à la viticulture au domaine fait que les assemblages d’une même cuvée, ainsi que son goût, peuvent différer d’un millésime à l’autre.
Les vins
Les dégustateurs sont unanimes à propos des rouges du domaine Le Raisin et l’Ange : gourmands, frais, digestes, fruités, ce sont de vrais vins de plaisir, des vins vivants auxquels un carafage fait souvent du bien. Ils évoquent immédiatement le partage, les amis, les tablées : ce ne sont pas des vins à boire en solitaire. Pas plus que les blancs finement ciselés, à base de sauvignon, de chardonnay, de grenache blanc.