L’appellation Jurançon est située dans le Sud-Ouest, dans le Béarn et le département des Pyrénées-Atlantiques. Ce petit vignoble du piémont pyrénéen s’étend sur un millier d’hectares entre le gave de Pau et la ville d’Oloron-Sainte-Marie. Il tient son nom du village de Jurançon, près de Pau, et a toujours eu une forte identité, célébrée au moins depuis Henri IV. Les vignes y sont plantées à flanc de coteau, entre 300 et 400 mètres d’altitude, sur des sols de poudingue ou de grès argileux. La conduite en hautain est courante, le feuillage pouvant atteindre 2,5 m de hauteur.
Le jurançon est surtout connu en tant que vin moelleux d’appellation Jurançon AOC (une des premières AOC de France, classée en 1936). Il existe aussi un jurançon sec, vin blanc classé AOC en 1975. Les rouges et les rosés produits dans la région sont en AOC Béarn.
Les cépages du jurançon sont au nombre de cinq, tous blancs. Les deux principaux (plus de 50 % de l’assemblage) sont le petit manseng et le gros manseng, seuls autorisés dans les vins dits de vendanges tardives. Le courbu blanc, le camaralet de Lasseube et le lauzet jouent le rôle de cépages complémentaires. On dit que le petit manseng est plus spécifique du jurançon moelleux et le gros manseng du jurançon sec (parce qu’il produit moins d’acidité), mais ce n’est pas une règle stricte. Les assemblages varient selon la maturité et les parcelles.
Les jurançons moelleux peuvent être des vins d’exception. Ils savent se sublimer en vieillissant, manifestant des notes de truffe noire au bout d’une dizaine d’années. En raison de leur richesse gustative, certains peuvent être considérés comme liquoreux. Ils sont complexes, acidulés, miellés, en fleurs blanches et en fruits tropicaux. Ils deviennent plus minéraux et plus liquoreux en vieillissant, prenant des notes de champignon, de sous-bois et de truffe, surtout dans le cas de vendanges tardives. Secs ou moelleux, ils sont excellents à l’apéritif, mais peuvent accompagner tout un repas. Les jurançons moelleux s’entendent avec les foies gras, les confits, les charcuteries et les plats du Sud-Ouest. Le jurançon sec est un vin élégant et complexe que l’on associera avec poissons (saumon et truite de l’Adour), fruits de mer, fromages de chèvre et de brebis (ossau-iraty) de l’Ouest pyrénéen.
Quels cépages sont utilisés pour produire les vins de Jurançon ?
Les vins blancs d’appellation contrôlée Jurançon, situés dans le département des Pyrénées-Atlantiques, qu’il s’agisse de vins moelleux ou de vins secs, ont le petit manseng et le gros manseng pour cépages majoritaires. Ils doivent en effet représenter plus de la moitié de l’assemblage pour que le vin mérite l’appellation. Les deux raisins sont d’origine locale et apparentés, mais bien différenciés sur l’appellation. Le gros manseng, produisant un peu moins de sucre, est plutôt associé aux vins blancs secs et le petit manseng aux vins moelleux. Ce dernier possède de superbes aptitudes au vieillissement et acquiert avec l’âge des notes subtiles et complexes, rappelant souvent la truffe noire. En réalité, les assemblages sont décidés sur la maturité et la parcelle, donc leurs proportions sont variables.
Les trois autres cépages sont le courbu blanc, précoce et un peu fragile mais apprécié pour son acidité ; le camaralet de Lasseube et le lauzet, qui sont d’usage minoritaire. Le camaralet apporte des notes épicées aux vins blancs secs, tandis que le lauzet favorise leur minéralité.
Pourquoi le vin de Jurançon est-il considéré comme un vin royal ?
Depuis au moins le XIVe siècle, le jurançon est un vin favori des familles nobles de Foix et de Navarre, mais il faut attendre le baptême du roi de France Henri IV (décembre 1553) pour que ce vin entre dans l’histoire de France pour ne plus jamais en sortir. Henri de Navarre, grand-père du futur roi, aurait alors frotté d’une gousse d’ail les lèvres du baptisé avant de lui faire boire un peu de vin de Jurançon. Jeanne d’Albret, la mère d’Henri IV, entretenait avec soin la vigne achetée par son père à Jurançon, et le vin de la région était renommé dans toute la France. Depuis ce baptême royal, le vin de Jurançon a connu des destins divers mais n’a jamais cessé d’être associé à la royauté. Au début du XIXe siècle, une monarchie en quête de restauration et de symbolisme reproduisit le cérémonial du baptême royal, propulsant à nouveau le jurançon vers une période faste. Pourtant, c’est à partir de la seconde moitié du XXe siècle et l’attribution d’une AOP (1936) que le vignoble de Jurançon reprend du poil de la bête. Reconstitué et restauré après le passage difficile du phylloxéra et de diverses maladies de la vigne, il connaît depuis une progression qui en fait aujourd’hui un vignoble de taille réduite mais de grand prestige.