« Fleury est, avec Selosse, un précurseur de la biodynamie en Champagne. Avec lui, on voit la Champagne de demain. »
Philippe Jamesse, sommelier du restaurant Les Crayères, à Reims.
Où ?
La côte des Bar, également appelée Barrois champenois, est la partie la plus méridionale du vignoble de Champagne. Cette microrégion inclut les villes de Bar-sur-Seine et de Bar-sur-Aube, desquelles elle tient son nom. C’est là, au village de Courteron, entre Bar-sur-Seine et Les Riceys (célèbre pour un rosé tranquille qu’aimait Louis XIV), qu’est ancrée l’histoire de la famille Fleury depuis 1895, une histoire qui l’a souvent vue faire œuvre de pionnier. Après la catastrophe du phylloxéra, Émile, le grand-père de Jean-Pierre Fleury, est le premier à implanter des pinots noirs greffés dans la région. En 1970, Jean-Pierre adopte des méthodes culturales écologiques avec un souci de recherche constant : désherbage mécanique, apport d’engrais organique… En 1989, il le premier de Champagne à convertir son domaine à la biodynamie. Désormais secondé par son fils Jean-Sébastien, Jean-Pierre innove aussi dans le domaine du nature : il est l’un des rares viticulteurs champenois à réaliser une cuvée sans soufre ajouté. Alors que certaines maisons de champagne travaillant en viticulture conventionnelle affirment qu’il est impossible de faire du bio et du nature sous le climat champenois, Fleury fait partie d’un petit groupe toujours croissant (Selosse, Beaufort, Boulard, Drappier, Laherte…) qui s’applique à démontrer le contraire. En Champagne comme partout ailleurs, la biodynamie réussit au vin et Fleury en est une preuve sans faille.
Terroir, parcellaire et encépagement
La partie viticole de la côte des Bar est essentiellement constituée par un plateau calcaire entaillé de nombreux cours d’eau, dont la Seine, la Marne et l’Aube. C’est là que la Seine reçoit ses premiers affluents. Cette hydrographie généreuse a créé de nombreuses vallées et un paysage vallonné propice à la viticulture. Les sols argilo-calcaires remontent au Jurassique supérieur (calcaires kimméridgiens). C’est sur ce type de sol, en coteau, que sont plantées les vignes du domaine Fleury, couvrant environ quinze hectares. L’encépagement est dominé par le pinot noir (85 %), suivi par le chardonnay (10 %), le pinot blanc (3 %) et le pinot gris (2 %). L’âge moyen des vignes est de trente-cinq ans. La maison pratique aussi l’achat de raisins bio aux environs pour compléter la production.
Méthodes culturales
À la vigne comme au chai, Le bio et la biodynamie sont les seules méthodes culturales de règle chez Fleury. Le domaine entier est en bio certifié, labellisé Ecocert, Demeter et Biodyvin. Le labour des terres est fait au cheval sur certaines parcelles. Les vendanges sont manuelles afin de mieux préserver les grappes. Aucun intrant chimique — désherbant, engrais, pesticide… — n’est utilisé.
Vinification
Selon la vinification de type champenois pratiquée par Fleury, le pressurage suit immédiatement la vendange. Les raisins sont collectés dans un grand pressoir traditionnel contenant quatre tonnes. Le pressurage est lent et délicat afin de respecter l’intégrité des jus à chaque stade de l’opération. Les moûts sont vinifiés sans soufre à l’aide de levures sélectionnées sur le domaine. Jean-Sébastien Fleury a installé au chai une galerie de huit foudres de chêne de 60 hectolitres pour l’élevage des vins de l’année et le vieillissement des vins de réserve. 55% des vins fermentent dans des cuves émaillées thermorégulées et 45 % en foudres ou fûts de chêne. Le remuage des bouteilles, qui permet aux vins de retrouver leur limpidité après la champagnisation, est effectué à la main sur pupitre. Après le remuage et le vieillissement sur lattes, les bouteilles sont dégorgées à la volée (la capsule est retirée manuellement et le dépôt est expulsé grâce à la pression interne). Pour Sonate, le dosage est de 0,9 g par litre, ce qui fait de ce champagne un extra-brut.
Les vins
Les neuf cuvées de champagne Fleury bénéficient d’un travail au plus près de la terre, des saisons et de la nature. De l’avis des dégustateurs, elles sont droites et vives, mélodieuses, un reflet fidèle du terroir, et expriment dans une gamme savoureuse la rondeur et la maturité du pinot noir de l’Aube. Parmi celles-ci, Culinaries propose Sonate, cuvée nature qui évoque toute la pureté originelle du raisin. Cet assemblage de pinot noir (60 %) et de chardonnay (40 %) est riche, expressif, vif et élégant, doté d’une grande persistance aromatique. Son potentiel de garde est de deux ans. Bulles abondantes, robe or brillant. Nez brioché et fruité, notes de coing et de pomme compotée. Aussi délicieux à l’apéritif que tout au long du repas, il doit être servi entre 10 et 12 °C.